J’ai été assez effaré par la vision du “doc” visible à l’adresse suivante, sur Intruders.tv.
Bon, d’accord, déjà, effaré parce qu’une vidéo de cette taille passe tout juste sur mon pauvre Powerbook qui commence a être dépassé par les événements. Snif !
Mais surtout, effaré par la teneur du doc. Le sujet, c’est NetVibes, et la couverture médiatique faite sur le départ de Pierre Chappaz, co-CEO de l’entreprise.Chappaz a en effet annoncé récemment qu’il préférait quitter le navire pour des questions de divergences avec le fondateur de NetVibes, en particulier sur le modèle économique du portail.
On peut effectivement se poser de sérieuses questions sur leur modèle économique dont les rentrées d’argent sont pour l’instant…plutôt floues. Ayant vécu moi même la bulle “Web 1.0” de l’intérieur, je ne peux qu’être plutôt sensibilisé et parfois perplexe sur des boîtes basées toute entière sur un projet, mais avec de grandes fragilités sur les stratégies à venir pour faire rentrer de l’argent dans la structure, hormis les classiques levées de fonds d’investisseurs.
Mais ce qui m’a effaré n’est pas le fond de l’affaire, dont on ne sait finalement pas grand chose, mais la forme du documentaire : ça se donne la forme d’un pseudo-journalisme d’investigation, au ton dramatisant, et surtout sans aucune réelle enquête. L’auteur se contente de se ballader sur des blogs, et de lire une sélection de commentaires faits par les visiteurs.
Où sont les faits ? Les infos ? On avait le café du commerce, où ceux qui en savent le moins sont ceux qui en parlent le plus, on a ici un parfait exemple d’un “méta café du commerce” : l’auteur rassemble des commentaires balancés par des anonymes, et en fait une compilation qui lui permet de propager lui même ses propres commentaires… sur un sujet qu’il ne maîtrise pas plus, et surtout sur lequel il ne sait… rien !
Entendre des termes tels que “NetVibes va mourir”, “Séisme”, même en n’ayant rien à voir avec cette société, en tant qu’entrepreneur moi même, ça me fait frémir d’entendre qu’on puisse dire ça publiquement d’une boîte, sans l’ombre d’une preuve, d’un élément, d’un argumentaire.
Je suppose fort heureusement que les investisseurs ne consultent pas ce blog, mais je n’ose imaginer les effets pervers que ça pourrait avoir.
Le seul élément objectif sur lequel s’appuie l’auteur, c’est précisément… l’absence d’information. En gros, le discours est “on nous dit rien, c’est donc qu’une catastrophe se prépare”. C’est sur qu’on peut être troublé par ce communiqué de Chappaz, qui en dit peut être “trop ou pas assez” (mais c’est surtout parce qu’il n’est pas courant d’annoncer publiquement ce genre de choses qu’on peut être perturbé). Troublé également par le silence des autres acteurs de cette affaire.
Mais n’est ce pas là le lot de n’importe quelle entreprise privée ? NetVibes n’est pas une administration publique, ni une boîte côtée en bourse, et n’est redevable que d’une chose envers son public : l’essentiel, la qualité du service. Pour le reste, je ne dis pas que je n’aimerais pas en savoir plus, mais c’est pour l’essentiel l’affaire des dirigeants, des salariés de cette structure, ainsi que de leurs investisseurs, point !
Epilogue provisoire de cette histoire : Krim a donné une interview à Netéco, afin de pallier un peu au manque de communication de sa boîte. Bon, si vous voulez mon point de vue, c’est pas vraiment très réussi, les admirateurs du “visionnaire Tariq” continueront à l’encenser, et les autres… resteront sans doute perplexes.
Mais surtout, si les blogs s’improvisent ainsi en journalisme de comptoir, on ne va avoir que le pire des deux mondes : le côté le plus racoleur d’un mauvais journalisme, et l’absence de vrai réseau d’information et d’investigation que peut avoir un rédacteur lambda derrière son clavier. J’ai pas vraiment envie de lire ça sur mon NetVibes !
UPDATE : Thierry Bézier, l’auteur du doc dont je parle, ayant pris la peine de commenter largement mon article, je vous invite à consulter les commentaires, très intéressants, je pense !