Bill Gates / Steve Jobs : la rencontre de l’année (2)

Journaliste : si Apple dit être essentiellement une compagnie faisant “du logiciel”, et que Microsoft se met a faire du hardware (Zune, XBox…), est ce que les deux compagnies ne convergent pas petit à petit ?

Steve : Alan Kay a dit “Les gens qui aiment faire du software doivent faire leur propre hardware”

Bill : Nous, nous faisons le choix de la variété. Pour les téléphones, où il existe déjà des tas de hardware différents existants, même si nous pourrions avoir aussi notre propre hardware, nous préférons mettre la priorité sur des partenariats avec les acteurs existants du marché.

Apple est un écosystème où ils font un super matériel super adapté à leur logiciel. Et nous faisons parfois celà, mais dans des cas bien particuliers, comme le prototype de “table” dynamique.

Steve : Ce problème est intéressant, et il est différent sur le marché pro et sur le marché grand public. Pour le grand public, hormis le cas des PC, il est difficile de trouver un secteur où hardware et software fonctionnent bien tout en étant conçus séparément. Ca commence peut être un peu pour les téléphones, mais celà n’est pas très clair.

Et nous y travaillons beaucoup car c’est un grand enjeu pour l’avenir. Dans certains cas, il vaudra mieux disjoindre, dans d’autres, il vaut mieux tout faire ensemble. Dans l’exemple des lecteurs MP3, il vaut mieux tout faire ensemble.

Steve (à propos du passé) : Il y a plein de choses que j’aurai pu faire autrement, si je regarde en arrière. Mais je préfère regarder devant moi et réfléchir a inventer le futur.

Le marché actuel est vraiment très sain. Il y a plein de nouveaux projets et de startups, beaucoup d’activité et de créativité.

Bill (à propos de la possible désuétude des ordinateurs personnels par rapport à Internet) : Il y a 5 ans, on prédisait l’avenir a un ordinateur uniquement dédié au Net, les “Network Computer” présentés par Larry Allison. On arrive aujourd’hui à une structure où l’application “locale” joue un grand rôle. Avec l’exploitation de la parole, de la vidéo, le tout est d’arriver a exploiter des données distantes avec des applications locales.

Quand on utilise une TV ou de l’informatique embarquée dans une voiture, on peut imaginer un applicatif très allégé. Mais sur un vrai écran, nous continuons a croire à un applicatif situé sur le poste client.

Steve : J’adore Google Maps. Quand nous avons voulu l’intégrer à l’iPhone, Google a commencé par nous fournir des API complètes sur lesquelles se greffer, sur le schéma du Google Maps habituel, dans un Browser. Mais nous avons fini par réécrire complètement le client localement, en ne faisant transiter que les données par le réseau. Et notre logiciel a stupéfait les gens de chez Google, ça dépassait tous les autres clients GoogleMap, même sur un ordinateur. Et on ne peut pas faire ça dans un browser.

Beaucoup de gens s’acharnent à faire tourner de plus en plus de choses sur un browser, avec de l’interactivité, que l’on soit connecté ou non. Mais les choses arrivent lentement, et un client riche “classique” permet de faire le plus de choses, d’autant plus que le hardware permet maintenant d’embarquer des clients riches avec un coût limité sur tous types de supports.

Bill : D’un point de vue de l’architecture, que laisser sur le client, et quoi déporter sur le réseau ? Qu’il s’agisse d’un petit ou d’un grand écran, au final, le client riche permet de meilleurs temps de réactivité, et c’est souvent ce qui finalement fait pencher dans la balance le client riche.

Bill : Le Tablet PC, c’est comme Windows en 1992. Tout reste encore à découvrir. Je crois à ce concept, qui est complémentaire d’un téléphone qui lui a pour vocation d’être dans une poche. Mais la tablette est un concept naturel, comme la voix ou l’encre.

A la maison, j’imagine que chaque surface, horizontale ou verticale, puisse devenir une projection de données que vous pourrez manipuler naturellement, pour les loisirs ou pour un “bureau à domicile”.

Steve : Le concept de PC a résisté au travers des années, bien qu’on ai prédit plus d’une fois sa mort. Je crois que le PC va continuer, tout en devenant plus mobile ou plus intégré à un bureau. Mais l’on va voir en parallèle l’explosion de périphériques “post-PC”. Des périphériques qui ne sont pas “généralistes”, mais dédiés à une fonction, comme un iPod ou un téléphone.

L’iPhone, d’un point de vue matériel, est un ordinateur complet. Mais qu’importe ? Ce qui compte c’est : qu’est ce que c’est, qu’allez vous en faire ?

Bill : On ne peut pas vraiment dire qu’est ce qu’intégrera un téléphone dans l’avenir. Dans l’absolu, on pourrait presque tout faire. Ce qui limite, c’est la taille de l’écran. Si un jour on avait un écran que l’on pourrait enrouler ou plier, cela changerait beaucoup de choses. La projection est aussi une autre piste. Nous avons des gens à Microsoft qui travaillent là dessus, mais rien avant l’horizon 5 ans.

Steve : Je ne saurai prédire ce que seront les assistants de poche dans 5 ans. Et je dis ça parce que, il y a 5 ans, je n’aurai pas su dire qu’on aurait des téléphones intégrant des cartes routières. Mais un jour, ce genre d’appli devient populaire, les gens l’utilisent, et vous êtes amené à vouloir l’adapter.

Les gens inventent constamment des trucs, et tout l’art est de faire le tri de ce qui sera sur ces périphériques ou pas. Mais l’axe principal reste la communication.

Steve : (à propos des communautés, wikis…) : Nous sommes en train de travailler sur des projets sur lesquels je ne peux rien dire pour l’instant. Il y a des millions de trucs super sur le net, ces nouveaux services que les gens utilisent. Une bonne partie de ces services servent à traverser sa vie d’une manière plus efficace. C’est vraiment super quand on montre quelque chose à quelqu’un et qu’on n’a pas besoin de le convaincre pour qu’il comprenne que ce service va résoudre un de ses problèmes.

Steve : .Mac n’a pas assez été développé, nous allons rattraper le temps perdu dans l’avenir.

Troisième et dernière partie